Chroniques
L’immigration : un levier essentiel pour nos régions
À la suite des récentes décisions du gouvernement fédéral visant à restreindre à la fois le nombre de résidences permanentes et de résidences temporaires, notamment les personnes étudiantes internationales, au Canada, les réactions continuent de se faire entendre. Mentionnons par exemple celles des communautés rurales qui dépendent largement des nouveaux arrivants et arrivantes pour soutenir leur vitalité et alimenter leurs économies locales. Les décisions prises par le gouvernement fédéral répondent peut-être à des enjeux soulevés dans les grandes villes du pays, mais n’oublions pas l’impact majeur de l’immigration sur les régions rurales avec un apport indispensable de talents et de diversité.
Le Nouveau-Brunswick, à l’instar d’autres provinces, ressent directement les effets de ces restrictions. Rappelons que, selon les données du gouvernement du Nouveau-Brunswick, notre province aura près de 133 000 postes à pourvoir dans les dix prochaines années. Notre capacité à répondre à ces besoins en main-d’œuvre avec la population actuelle se chiffre à environ 60 %. C’est-à-dire que 40 % de ces postes devront être remplis par des personnes qui se joindront à la province par les voies de l’immigration. De plus, 40 % de ces postes nécessiteront une formation collégiale et 24 % demanderons une formation universitaire.
Le Collège communautaire du Nouveau-Brunswick (CCNB) et l’Université de Moncton jouent un rôle de premier plan dans l’enracinement avec succès des personnes étudiantes internationales, tant au niveau éducatif que communautaire. Tout au long de leur parcours d’études, ces personnes étudiantes sont formées aux normes de compétences pour nos besoins, certes, mais elles sont aussi exposées à notre culture. Elles créent un réseau personnel et professionnel, occupent des emplois à temps partiel et développent des habitudes de vie dans nos communautés. Il s’agit là d’un des meilleurs outils à notre disposition pour assurer une réussite du projet de société que représente l’immigration en Acadie.
Toutefois, les nouvelles mesures annoncées menacent directement la capacité de nos institutions postsecondaires à recruter, former et intégrer les personnes étudiantes internationales dans le marché du travail de notre province. Par conséquent, ceci crée un obstacle pour répondre à nos besoins criants de main-d’œuvre.
Les universités et les collèges communautaires, comme l’Université de Moncton et le CCNB, ont un rôle crucial à jouer dans ce processus. En offrant des programmes de formation professionnelle et des programmes adaptés aux besoins locaux, régionaux et provinciaux, ils permettent aux nouveaux arrivants et arrivantes de répondre aux besoins de nos communautés locales. Lorsque le ministre de l’Immigration met en place des mesures restrictives pour les diplômés collégiaux et universitaires pour accéder au Permis de travail post-diplôme, ceci aura un impact significatif sur une province comme la nôtre, qui dépend du travail de ces diplômés pour assurer des services essentiels.
Le système actuel, principalement axé sur les grandes villes, désavantage les petites provinces et les régions rurales. Dans les métropoles comme Toronto, le marché de l’emploi offre naturellement plus d’opportunités pour les nouveaux arrivants et arrivantes, mais cela laisse les régions en déficit de main-d’œuvre. Les politiques d’immigration devraient donc être adaptées aux besoins spécifiques des différentes régions. Une approche plus flexible et décentralisée permettrait aux provinces et aux communautés de tirer pleinement parti des avantages de l’immigration.
En conclusion, si le Canada veut réellement soutenir le développement économique de l’ensemble de son territoire, il est impératif d’adopter une approche plus nuancée et flexible en matière d’immigration. Les réalités et les besoins de chaque région sont différents, et une politique unique ne peut répondre adéquatement aux défis des zones rurales et urbaines. En collaboration avec les provinces, le gouvernement fédéral devrait mettre en place des programmes d’immigration adaptés aux besoins spécifiques de chaque région, en tenant compte de l’importance des institutions d’enseignement, comme le CCNB et l’Université de Moncton, pour attirer, former et intégrer ces nouveaux talents au sein de nos communautés francophones au Nouveau-Brunswick.
Gaëtan Thomas
Président-directeur général du Conseil économique du Nouveau-Brunswick