Chroniques
Le problème grandissant de la productivité au Canada et quelques pistes de solutions
Tout le monde sait que la santé d’une économie dépend de plusieurs facteurs, mais la productivité est l’un des plus importants. Je trouve la faible productivité au Canada très inquiétante, car ce sujet est très peu discuté comparativement à bien d’autres dossiers économiques, sociaux et environnementaux. Et comme l’avancement de tous ces dossiers repose sur une économie saine, attardons-nous sur ce point fondamental qu’est la productivité. Le succès de notre vision au Conseil économique du Nouveau-Brunswick (CÉNB) de « Propulser l’économie du Nouveau-Brunswick » dépend de cette productivité.
Selon la première sous-gouverneure de la Banque du Canada, Carolyn Rogers : « Quand la productivité est forte — ce qui amène une croissance plus rapide, des emplois plus nombreux et des salaires plus élevés —, l’économie est mieux protégée contre les risques d’inflation élevée. La productivité au Canada n’affiche aucune croissance ces dernières années. En quatre décennies, nous avons même considérablement reculé par rapport à certains autres pays. En fait, si l’on nous compare aux États-Unis, seule la productivité de l’Italie a régressé plus que la nôtre au sein du G7. »
Carolyn Rogers ajoute : « C’est un sujet important parce que plusieurs facteurs menacent dorénavant d’alimenter la persistance d’une forte inflation. Notons par exemple les tensions commerciales mondiales, l’évolution démographique et l’incidence économique des changements climatiques. Nous devons stimuler notre productivité dès maintenant en prévision de ces sources de pression. »
Le conseil d’administration du CÉNB est bien d’accord avec elle. Depuis l’annonce des tarifs qui pourraient être imposés par le gouvernement américain sur nos exportations, nous devons accélérer nos efforts pour améliorer la productivité de nos industries pour qu’elles demeurent concurrentielles.
Quelle est la recette d’une forte productivité ? Carolyn Rogers considère trois éléments qui contribuent à la renforcer. Premièrement, l’intensité du capital peut mieux outiller la main-d’œuvre, notamment de la machinerie, et améliorer l’efficacité et la production grâce à de nouvelles technologies. Deuxièmement, la composition du travail peut améliorer les compétences et la formation du personnel. Troisièmement, la productivité multifactorielle utilise le capital et le travail plus efficacement.
Carolyn Rogers met également l’accent sur deux axes stratégiques : « Concentrer l’activité économique dans les secteurs à valeur ajoutée, et réaliser notre travail de façon plus efficace. Dans les deux cas, le bilan du Canada n’est généralement pas reluisant. Cette situation doit changer pour que tout le monde puisse profiter d’une économie stable et prospère. »
Quand on améliore la productivité, toutes et tous, nous sommes gagnantes et gagnants en passant par la force de travail, les entreprises et les gouvernements aussi.
Je suggère quelques pistes de solutions pour augmenter notre productivité au Canada :
- Les programmes d’études postsecondaires et de formation professionnelle doivent mieux correspondre aux besoins des entreprises.
- Reconnaissons les compétences des nombreuses personnes immigrantes déjà ici au Canada.
- La plupart de nos entreprises doivent adopter des cultures d’innovation et d’efficacité pour demeurer concurrentielles.
- Les gouvernements provinciaux et le fédéral doivent investir dans l’innovation afin de stimuler plus de transformations dans des secteurs à valeur ajoutée dans notre pays au lieu d’envoyer nos ressources naturelles pour les transformer ailleurs. Ces démarches attireront aussi des investisseurs du secteur privé pour investir dans notre pays.
D’ailleurs, Carolyn Rogers continue : « Mais l’aspect central, c’est probablement l’investissement, qui est loin d’être suffisant au Canada en ce qui concerne les machines, le matériel et la propriété intellectuelle. En fait, le niveau des investissements a diminué durant la dernière décennie. Tout le monde a un rôle à jouer pour instaurer le climat d’investissement dynamique qui contribuera à stimuler la productivité. Si la productivité augmente, tout le pays profitera d’une croissance solide et de meilleurs salaires sans que l’inflation soit forte. Dans une économie saine, nous sommes plus aptes à gérer les pressions inflationnistes sans autant dépendre des hausses de taux d’intérêt. À la Banque du Canada, nous continuerons de travailler à assurer la stabilité idéale pour la prise de risques et l’investissement. »
J’aimerais bien que nos gouvernements provinciaux et le fédéral se fixent le même objectif de travailler à assurer la stabilité idéale pour la prise de risques et l’investissement. Ceci permettra à beaucoup d’entreprises de faire leur part d’investissements au Canada, renversera la tendance des investisseurs à investir ailleurs et favorisera la croissance de notre économie. Une économie en santé est la meilleure façon d’assurer l’avenir de nos bénéfices sociaux tels l’éducation et la santé, ainsi que d’avancer nos initiatives environnementales très importantes pour atténuer les effets climatiques. C’est tout un défi, mais c’est ensemble que nous réussirons !
Gaëtan Thomas
PDG du CÉNB