Chroniques
Comment remédier à la pénurie de logements au Canada (1ère partie)
Pour les deux prochaines semaines je vais présenter l’article « La grande reconstruction : sept façons de remédier à la pénurie de logements au Canada » écrit par Robert Hogue, économiste principal chez RBC, qui décrit très bien la réalité canadienne. M. Hogue cite : « Trop de Canadiens ont de la difficulté à trouver un logement abordable, ce qui fait du logement une question déterminante dans la politique et l’économie de ce pays. La crise touche maintenant les Canadiens à revenu intermédiaire et s’étend au-delà des grandes villes. Elle frappe au cœur du rêve canadien de posséder une maison et génère des tensions aiguës entre les générations. Cette situation pourrait prendre des proportions encore plus alarmantes si nous ne réagissons pas dès maintenant. » Nous sommes d’accord avec les énoncés de M. Hogue.
Il estime que d’ici 2030, plus de la moitié des nouveaux ménages n’auront pas les moyens d’acheter une maison. Ce chiffre qui correspond à 1 million de nouveaux ménages est presqu’autant que tous les ménages dans les provinces de l’Atlantique en ce moment.
Il continue en affirmant : « Le coût de l’accession à la propriété a grimpé en flèche à partir du milieu de 2020 dans l’ensemble du Canada. La proportion de Canadiens qui peuvent se permettre d’acheter une maison a nettement diminué. Nous estimons que seulement 45 % de tous les ménages ont suffisamment de revenus pour posséder une copropriété, et qu’une part plus réduite de 26 % des ménages a suffisamment de revenus pour acheter une maison individuelle, compte tenu des prix et des taux d’intérêt actuels. Cela représente une baisse par rapport aux 61 % et 49 % d’il y a deux décennies, respectivement. Posséder une maison n’a jamais été aussi inabordable au Canada. La situation est devenue encore plus difficile pour les locataires, et il n’a jamais été aussi difficile de trouver un appartement. Le taux d’inoccupation des locations a chuté à 1,5 % à l’échelle nationale en 2023, un creux historique. Tous les marchés urbains à une seule exception près (Belleville) ont un taux d’inoccupation inférieur à ce qui est considéré comme le point d’équilibre (3 %). Et les loyers ont explosé. Les locataires canadiens ont payé 100 $ de plus en moyenne par mois l’an dernier, en incluant les locataires qui vivent dans des appartements à loyer contrôlé, ce qui représente près de quatre fois l’augmentation annuelle moyenne de la décennie précédant la pandémie. »
En résumé, le prix des loyers a explosé et beaucoup plus de Canadiens auront de la difficulté à appartenir une maison à l’avenir.
M. Hogue nous suggère sept recommandations pour relever le défi de l’offre et de l’accessibilité. Cette semaine, je vais partager les trois premières recommandations de son rapport comme suit :
1. Accroître rapidement le bassin de main-d’œuvre du secteur de la construction.
Le Canada pourrait avoir besoin d’au moins 500 000 travailleurs supplémentaires, en moyenne, pour construire toutes les maisons nécessaires entre maintenant et 2030, et encore plus à court terme pour faire face au pic de la croissance de la demande. Tous les moyens doivent être mis en œuvre pour attirer plus de travailleurs dans le secteur comme :
- Privilégier les compétences en construction parmi les nouveaux immigrants
- Fixer des objectifs ambitieux en matière d’inscriptions dans les écoles de métiers qualifiés
- Encourager les travailleurs âgés à conserver leur emploi plus longtemps
2. Élaborer et adopter des conceptions, des techniques et des technologies de construction innovantes.
Continuer à construire des maisons de la même façon que par le passé rendra plus difficile d’améliorer la construction au niveau requis (et d’atteindre nos objectifs de carboneutralité). De nouvelles méthodes doivent être mises en œuvre pour accroître le nombre de maisons produites par travailleur. Nous n’atteindrons pas cet objectif sans mal. Le secteur de la construction a une feuille de route médiocre sur le plan de la productivité. Il y a aujourd’hui plus de travailleurs de la construction résidentielle par unité achevée qu’il y a deux décennies. Cette tendance doit s’inverser. Des solutions suggérées sont :
- Favoriser l’adoption de logements préfabriqués
- Créer un catalogue de conceptions de maisons préapprouvées
3. Accélérer l’approbation des projets.
Les règles et les règlements régissant le développement et la construction de logements, souvent bien intentionnés au moment de leur adoption, se sont accumulés au fil des ans. Nous avons maintenant un enchevêtrement de règles pesantes et complexes qui augmentent énormément les délais et les coûts des projets. Les délais d’approbation des projets au Canada peuvent être parmi les plus longs au monde. Rationaliser les processus d’octroi de permis, mettre en place des outils basés sur l’intelligence artificielle et accélérer les mécanismes de résolution de conflit permettrait d’accélérer la mise sur le marché de logements neufs tout en réduisant l’incertitude et les coûts de développement. Cela améliorerait l’environnement d’investissement pour les participants privés ou sans but lucratif. Il faudrait considérer des solutions comme suit :
- Simplifier les processus d’approbation
- Établir des échéanciers pour les approbations et rendre les organismes d’approbation responsables de la conformité aux exigences
- Accorder la priorité aux projets de construction qui ont un délai d’exécution plus court
- Récompenser les municipalités qui appliquent les meilleures pratiques
- Renforcement des mécanismes de résolution des conflits
- Alléger et harmoniser les codes du bâtiment
M. Hogue affirme : « Pour résoudre la crise du logement, une plus grande collaboration sera nécessaire entre les gouvernements, l’industrie et les différentes parties prenantes, parce qu’aucune de ces parties ne peut y parvenir à elle seule. Face à l’étendue du problème, les efforts devront aller au-delà de ce qui a été fait jusqu’à maintenant par les décideurs, et des mesures plus audacieuses seront nécessaires pour débloquer l’offre de logements. » Comme c’est une des priorités de nos membres, le CÉNB espère voir des actions concrètes de nos gouvernements dans les plus brefs délais. Le secteur privé et le CÉNB sont prêts à collaborer pour avancer les recommandations ci-dessus. Notre économie y en dépend !
Ensemble, nous y arriverons !
Gaëtan Thomas
Président-directeur général du Conseil économique du Nouveau-Brunswick